Credit photo. bulletin de paie
Credit photo. bulletin de paie

La plupart des employés sont obligés de faire recours à des prêts pour combler leurs besoins.

« Contracter un prêt » c’est ce que font la plupart des employés rencontrés pour gérer les arriérés de salaire. Nombres de travailleurs, notamment ceux des petites et moyennes entreprises (PME) sont fréquemment confrontés aux arriérés et retards de salaire. C’est le cas de Delphine Emboussi, commercial dans une agence de communication à Douala. À en croire cette dernière, l’entreprise qui l’emploie lui doit deux mois de salaires impayés. Pendant cette période, elle avoue avoir connu beaucoup de difficultés financières pour combler ses propres besoins et ensuite ceux de sa famille. Au final, elle admet s’être vu obliger d’emprunter de l’argent pour résoudre ses problèmes. Pour Rodrigue Afion, employé dans une imprimerie au quartier Akwa (Douala) ce n’est pas chose facile de gérer son quotidien sans salaire. Après avoir passé trois mois sans salaire l’année dernière, il admet avoir voulu même renoncer à son travail. « J’avais des factures à payer, certes je ne suis pas marié, mais cette période semblait interminable au regard des problèmes qui s’accumulaient au quotidien, je fus obligé de faire recours à des prêts », fulmine-il.

Pour Christian Kaptué, enseignant dans une école privée au quartier Village(Douala), le constat est le même. Selon lui, passer un mois sans salaire entraine à la longue des problèmes psychologiques. « Je n’arrive plus à me concentrer normalement, je ne dispense pas correctement les cours aux enfants. Je suis en désarroi », affirme-t-il. Dans ce cas, pour résoudre son problème, il s’est donc aussi vu obliger de s’endetter. Dans un autre cas, certains travailleurs pour éviter ce désagrément ont trouvé une autre astuce. Pour Marguerite Tientcheu, enseignante, il faut faire d’autres « business » ou monter un autre petit boulot pour contrecarrer cet obstacle. C’est d’ailleurs ce qu’elle a pris l’habitude à faire depuis maintenant six mois. Chaque week-end, elle fait du commerce. « Je vends des vêtements issus de la friperie au marché du Rail au quartier Bonaberie, ainsi, j’évite les problèmes avec mon bailleur », révèle-t-elle.

Toutefois, les problèmes de salaire ne sont pas seulement observés dans les entreprises privées. Certains employés de la fonction publique ne diront pas le contraire. Si ces derniers sont souvent rarement confrontés aux arriérés de salaire, nul doute qu’ils ont des retards de salaire. « Nous avons souvent des retards de salaire, mais nous n’avons pas d’arriérés. C’est vrai que cela fruste beaucoup de savoir que, ton salaire est prévu tombé à une date précise et ce n’est pas le cas », affirme un fonctionnaire dans l’anonymat.

Ghide

Blaise Djouokep, Journaliste

Blaise Djouokep, Journaliste

Réactions

Blaise Djouokep, journaliste

«Tout travail doit être rémunéré »

« Avoir des arriérés de salaires n’est pas chose facile. Car selon la loi, il est indiqué que tout travail doit être rémunéré. Alors, lorsqu’un employé à la fin du mois ne perçoit pas son salaire cela devient problématique. Car, c’est avec cet argent qu’il va pouvoir à son tour combler tous ses besoins et résoudre ses problèmes. Mais lorsqu’il n’est pas payé c’est très contraignant. Et, cela devient encore plus difficile pour lui lorsque ces arriérés persistent. Dans mon cas, pour éviter ce type de désagrément, je fais des piges dans certains médias. Ceci aussi dans le but d’arrondir mes fins du mois ».

Alain Niwo

Alain Niwo

Alain Niwo, ancien transporteur de marchandises

« Faire des petits boulots pour joindre les deux bouts »

« Au Cameroun, le problème d’arriérés de salaire est très fréquent. Et l’on se demande même souvent si nos employeurs sont conscients de ce qu’ils nous font subir. Un individu ne peut pas travailler tout un mois puis être certain de percevoir son dû à la fin, on le fait comprendre qu’il n’y a pas de salaire. Ce n’est pas normal. Par moment, il pense que le déficit de ce mois va être comblé le mois prochain, mais il se retrouve entrain de passer encore deux autres mois sans salaire. Ce qui n’est pas juste. Dans ce cas, il se voit obliger d’emprunter de l’argent chez des amis pour résoudre ses problèmes. Et le jour où il perçoit son salaire, c’est pour rembourser sa dette. De même, il faudrait aussi que cette personne fasse des petits travaux pour joindre les deux bouts ».

Sandra Nga, gérante d’un cyber café

« Des mois sans salaire ne sont pas avantageux »

« Faire un ou plusieurs mois sans salaire n’est pas avantageux pour l’employé. Le simple fait qu’il ne perçoit pas son salaire peut l’emmener à ne plus bien effectuer son travail. Ça le décourage et le pousse à la démission. Conséquence l’entreprise peut perdre un bon élément. En Afrique particulièrement au Cameroun, nos patrons ne nous donnent pas assez souvent d’explications à ce sujet. Ils nous disent juste que les caisses sont vides. Mais d’un autre côté, ce n’est pas le problème du bailleur, ou d’Eneo, soit l’un te met à la porte, soit l’autre te coupe l’électricité. Dans tous les cas, c’est l’employé qui perd, mais il doit aussi savoir qu’il a des droits, car tout travail doit être rémunéré comme l’indique le code du travail ».

Propos recueillis par Ghide

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