Au cours de ces sept dernières années (2008-2015), celles-ci n’ont pas cessé de croître.

Les créances en souffrance ne cessent de croître en zone Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac). De 2008 à 2015, elles ont augmenté de 613,2 milliards en sept ans, passant de 280,74 milliards (en 2008) à 894 milliards en 2015. Soit une hausse d’environ 320%. Entre 2008 et 2009, elles sont passées de 280,74 milliards FCFA à 335,08 milliards FCFA, soit une augmentation de 54,34 milliards de FCFA. Et, entre 2009 et 2010, les créances en souffrance sont passées de 335,080 milliards de FCFA à 392 544 milliards de FCFA. Une hausse de 57,46 milliards de FCFA. De 2010 à 2011, les mêmes créances ont de nouveau augmenté (35 milliards), passant ainsi de 392,54 milliards à 427 milliards de FCFA. Et entre 2011 et 2012, le phénomène de la hausse s’est poursuivi. Les créances en souffrance sont passées de 427 milliards à 495 milliards (hausse de 67,6 milliards de FCFA). En l’espace de deux ans, les mêmes créances ont augmenté de 201 milliards, passant de 495 milliards (en 2012) à 696 milliards (en 2014). Mais ce qui est davantage frappant, c’est le fait que ces créances ont augmenté de 198 milliards entre 2014 et 2015 ; puisque rendu à fin mars de l’exercice en cours, les créances en souffrances ont atteint 894 milliards. Comme on peut bien le constater, le secteur bancaire de la Cemac a vraiment du mal à recouvrer l’argent prêté aux clients.

Présidant, le 03 juillet 2015 à Douala, la réunion du président de la Commission bancaire d’Afrique centrale (Cobac) avec les dirigeants des établissement de crédit de la zone Cemac, le gouverneur de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC), Lucas Abaga Nchama, a tiré la sonnette d’alarme, invitant les patrons du secteur bancaire de la sous-région à inverser cette tendance haussière des créances en souffrance. Pendant la deuxième rencontre du secrétariat général de la Cobac avec les commissaires aux comptes des établissements de crédit de la Cemac, en 2011, les experts avaient alors décelé plusieurs facteurs expliquant cette tendance haussière des créances. Parmi lesquels le « surprovisionnement ». D’après le rapport de ladite rencontre, cette situation découle vraisemblablement d’une mauvaise prise en compte du niveau réel des créances en souffrance dans les systèmes d’information de certains établissements. En outre, « il apparaît aussi que les créances douteuses constituent la plus grande part des créances en souffrance, soit 81% », peut-on lire dans ce rapport.

Pour le président de la Cobac, Lucas Abaga Nchama, même si la situation n’est pas si alarmante il faut, cependant, plus de prudence. La mise en œuvre du règlement Cobac relatif à la classification, à la comptabilisation et aux approvisionnements des créances des établissements de crédit, qui a été récemment présentée aux banquiers, dans le cadre d’un exposé, contribuera à améliorer les choses. Entré en vigueur le 1er janvier 2015, «ce nouveau règlement fixe le cadre de gestion du risque de crédit, qui constitue le risque le plus important pour les établissements de crédit dans la zone Cemac », apprend-on.

Joseph Roland Djotié, Ghide

Tableau : Evolution des créances en souffrance  dans la Cemac de 2008 à 2012.

En millions de FCFA

Dec 2008

Dec 2009

Dec 2010

Dec 2011

Dec 2012

2014

Mars 2015

Moyennes

Créances brutes en souffrance

280 740

335 080

392 544

427 460

495 068

696 000

896 000

386 178

Créances impayées

36 665

56 381

60 219

71 653

114 094

 

 

67 722

Créances immobilisées

2 493

20 231

14 115

8 188

14 238

 

 

11 853

Créances douteuses

241 582

258 468

318 210

347 619

366 736

 

 

306 523

Crédits bruts

2893544

3 184 650

3 837 019

4 820 473

5 424 220

 

 

4 031 981

 Sources. Cobac

Chrétien Tabetsing, économiste

Chrétien Tabetsing, économiste

Chrétien Tabetsing

« Les perspectives de l’économie mondiale ne sont pas bonnes »

L’économiste revient ici sur l’évolution des créances en souffrance dans la sous-région Afrique centrale.

A l’occasion de la 7ème session de la rencontre entre le président de la Cobac et les dirigeants des établissements de crédit de la zone Cemac, on a constaté  que  le volume de crédits en souffrance dans les banques de la Cemac est de 894 milliards FCFA. Quel peut être l’impact de cette situation sur l’économie de la sous-région et le secteur bancaire ?

L’augmentation du volume des crédits en souffrance dans les banques de la Cemac peut avoir un impact sur les principaux taux directeurs de la BEAC.  Car, il y a risque d’accroissement des provisions pour créances en souffrance. Si la situation perdure, il faut craindre une potentielle tension inflationniste sur l’économie de la sous-région (2% à 3,3%) et par conséquent des difficultés accrues pour le remboursement par les créanciers des emprunts effectués auprès des banques.

A fin mars 2015, les créances en souffrance s’élevaient à 894 milliards FCFA, contre 696 milliards de FCFA en 2014. Pourquoi ces créances en souffrance ont une tendance haussière si importante ?

Il faut reconnaître que les perspectives de l’économie mondiale ne sont pas bonnes. En outre, notre région, en plus de la situation économique mondiale incertaine, mène une guerre sans merci aux terroristes Boko Haram. Cette situation nécessite des moyens colossaux (Tchad et Cameroun, etc) et les banques sont aussi créancières des Etats. Les banques et les Etats se partagent la dette intérieure de la sous région Cemac. Cette situation amène certaines banques à ne pas respecter les normes prudentielles édictées par la Cobac. Dans un contexte aussi confus, l’hypothèse des créances douteuses ne peut pas être totalement écartée.

Même si le président de la Cobac a indiqué lors de cette session que ces créances  en souffrance ne sont pas si alarmante, ne sommes nous pas en droit de nous inquiéter ?

Il va de soi que la situation n’est pas alarmante car il y a malgré tout une évolution positive des principaux agrégats du système bancaire de la Cemac. Une bonne gouvernance devrait permettre la solidité et la stabilisation du système bancaire de la Cemac.

Propos recueillis par Ghide

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