Didier Yimkoua, Ecologiste
Didier Yimkoua, Ecologiste

L’écologiste revient sur les changements climatiques au Cameroun au regard de la situation qui prévaut dans les zones rurales et urbaines.

Comment percevez-vous les effets du changement climatiques dans les zones rurales et urbaines ?

Les changements climatiques sont la modification d'un facteur climatique (température, précipitation) sur une période donnée. Ils sont la conséquence des émissions de gaz à effet de serre générés par les activités humaines (transport, agriculture, consommation d'énergies non renouvelables, déforestation, BAT, eaux usées, industries). Certains facteurs accentuent son acuité à savoir : le taux d'accroissement démographique, la pauvreté. La perception des changements climatiques varie en fonction des zones agro-écologiques. Dans la zone agro-écologique soudano-sahélienne, la longue période de la saison sèche, la dégradation des sols et la rareté de l'eau potable sont les impacts les plus perceptibles dans cette zone. Par contre dans la zone des hautes terres de l'ouest et du nord, la forte pression sur les terres liées à la croissance démographique entraîne la perte des surfaces végétales et exposent les sols nus à l'érosion hydrique et éolienne. En clair, l'érosion des sols favorisée par la géomorphologie de la région, y est le facteur pertinent des changements climatiques. Dans les zones forestières bimodales, les facteurs tels que la déforestation, l'exploitation minière, l'exploitation des grandes fermes agro-pastorales, utilisation des pesticides et engrais chimiques, augmentent les sources d'émission des gaz à effet de serre. Les fortes précipitations entraînent le débordement des eaux des fleuves suivis des fortes inondations. Dans les zones urbaines, la chaleur et les inondations après les fortes précipitations peuvent être perçues comme des effets liés aux changements climatiques tant les sources d'émission des gaz à effet de serre sont nombreuses: les gaz d'échappement des motos et voitures, les effluents gazeux générés par les industries, la fermentation des ordures organiques, les eaux usées....

Qu’est ce qui faut faire pour résoudre ces problèmes et préserver notre environnement ?

La résolution de ces problèmes passe en priorité par l’éducation des masses et les campagnes de sensibilisation. Il faut apprendre à vivre avec les changements climatiques en développant des mécanismes d'adaptation tels que la pratique de l'agro écologie dans l'agriculture, la promotion des énergies renouvelables, la valorisation des déchets, les projets de boisements et de reboisements, le développement des villes vertes, les établissements classes doivent respecter les normes de rejets des affluents gazeux, liquides et solides en conformité avec la réglementation en vigueur. En la matière, les collectivités territoriales décentralisées ont un rôle primordial à jouer car elles sont des véritables laboratoires du développement durable.

Quel impact sur l’économie nationale ?

L'impact des changements climatiques sur l'économie est assez pertinent dans la mesure où notre économie se repose à 80%, sur les activités agro-pastorales. La désertification, l'accès difficile à l'eau potable entraînent une baisse de productivité source de crise alimentaire. L'insécurité alimentaire est susceptible d'engendrer des conflits intercommunautaires et l'exode rural. La résurgence des anciennes pathologies et des nouvelles épidémies est liée au réchauffement de la terre. Illustration parfaite de cette problématique transnationale est la disparition inéluctable du Lac Tchad. Laquelle est liée à 50% aux effets des changements climatiques et 50% aux activités anthropiques (le bassin du Lac Tchad compte 35 millions de population cosmopolite des pêcheurs, pasteurs et cultivateurs. Très riche en diversité biologique, il couvrait une surface de 23000km2 en 1970. Il couvre aujourd'hui à peine 2000km2. Et, frappé par les crises multiformes, il est devenu le sanctuaire des recrues des éléments djihadistes qui grossissent les rangs de Boko Haram).

Est-ce que les différentes résolutions prises lors de la Cop21 à Paris semblent être une bonne solution ?

L'accord de Paris 21 est une opportunité de développement à saisir. Tout dépend de la capacité de monter des projets bas carbone à mesure de capter les financements qui seront loges dans le Fonds Climat ou Fonds vert comme compensation réservée à l'Afrique pour son apport à la lutte contre le réchauffement planétaire. L'Afrique a raté l'opportunité offerte par les MDP (mécanismes de développement propres) liés au Protocole de Kyoto. La Chine et l'Inde ont profité grassement de ces financements et sont aujourd'hui parmi les gros pollueurs de la planète avec une économie citée comme exemple de réussite. L'accord de Paris 21 sera introduit au parlement camerounais en juin 2016, après ratification, chaque entité nationale doit en faire bon usage. La réussite de l'implémentation de cet accord passe par une bonne information, la formation et l'éducation. Les Center of Talent Développement (CTD), Universités, ONG, politiques doivent s'en approprier afin de relever le standard du niveau de vie des populations et surtout des couches vulnérables aux changements climatiques. Nous allons après l’instrument de la ratification, créer une plate forme d'échange d'information, de formation et surtout d'expériences réussies des projets bas carbones. Nous reviendrons sur l'économie circulaire en matière de gestion des déchets qui en font plutôt des ressources, car susceptible d'être réutilisé dans la chaîne de production pour générer de nouveaux produits à forte valeur économique. Les jeunes doivent saisir cette opportunité qui s'offre à eux afin de quitter le chômage. Ils doivent au préalable se regrouper en Groupe d'initiative commune (GIC). Ils doivent s'informer ensuite proposer des projets tels que le reboisement, la valorisation énergétique des déchets, l'agro-écologie.

Propos recueillis par Ghide

Retour à l'accueil